Comportement : la relation entre jeu et établissement de la hiérarchie chez les rats
Les rats ont par nature un comportement joueur. Les plus jeunes ne cessent de s’amuser de différentes façons, qu’il s’agisse de se pourchasser, fuir, sauter les uns sur les autres, etc. Cela s’articule le plus souvent autour des mêmes « séquences comportementales ».
Panksepp a pu établir lors d’une étude menée en 1981 que les rats commençaient à jouer dès l’âge de 18 jours. Cela s’intensifie jusqu’à 30 ou 36 jours, puis diminue. Il a par ailleurs noté que les mâles étaient plus joueurs que les femelles.
Chez les juvéniles, le but est de retourner l’adversaire au sol. Entre le sevrage et la maturité sexuelle qui intervient vers l’âge de deux mois, les agressions entre mâles avec renversement s’accélèrent. Le vainqueur renverse de plus en plus souvent ceux qu’il a déjà soumis auparavant (soit 70 % du temps) et les bloque au sol de plus en plus longtemps, selon ce qu’a démontré ce chercheur. A l’origine, l’idée communément admise était que le jeune vainqueur deviendrait le mâle adulte alpha du groupe, c’est à dire le dominant. En fait, le concept était que de ce rapport de force déséquilibré dans le jeu émergeait celui qui serait en haut de la hiérarchie à la maturité. Toutefois, les choses sont sensiblement plus complexes.
En 1991, les scientifiques Pellis et Pellis ont relancé ce débat. Ils ont mis en évidence le fait qu’au début de sa vie, le rat livrait des combats plus ludiques. Dans le même temps, ils ont observé que l’adversaire qui subissait le plus d’assauts était aussi plus fréquemment renversé. Or, une fois mature sexuellement, celui qui a jusque là le dessus se trouve à la place de celui qui est à terre. Cette inversion est assez curieuse. Elle s’explique par le fait qu’à force d’être attaqué, le perdant peaufine de plus en plus sa technique de défense, ce qui au bout d’un certain temps le conduit à mener une contre-attaque réussie.
En fait, dès le sevrage, la plupart se défendent en se retournant les pattes en l’air, poussant de petits cris de complainte. Plus ils vieillissent, moins ils se retournent complètement. Les plus âgés retournent seulement le haut de leur corps, gardant les pattes arrières posées sur le sol. En partant de cette position, ils peuvent mieux riposter en cas d’attaque, comme Pellis et Pellis l’ont découvert en 1987. Ils peuvent ainsi devenir des adultes aguerris et dominants au sein d’un groupe. Ainsi, s’affronter pour s’amuser n’est pas le prélude d’un combat réel.
En revanche, la relation qui s’établit alors entre les congénères devient cohérente assez tôt. Tout comme les adultes, les sujets subordonnés initient la plupart des jeux de combat, auxquels le dominant tente d’échapper. Mais les sujets soumis répondent de façon ludique à l’agression d’un dominant, ce qui tend à démontrer qu’il s’agit souvent d’une façon de se faire accepter par le groupe. Une fois mature, le dominant est à l’origine de la plupart de ces jeux. La cible est en général la nuque. Celui qui se défend va alors développer un jeu de de protection pour se soustraire à son agresseur. Un véritable affrontement implique de viser le dos et les membres inférieurs, en vue d’infliger une morsure sur le dessus du dos.
En fait, les jeux de combat ne sont pas uniquement un apprentissage juvénile d’agression des adultes. En effet, les adultes continuent à jouer, mais pas forcément pour s’affronter, car les tactiques et les objectifs sont différents.
En fait, les jeux d’affrontement diffèrent des combats entre adultes, car la zone du corps visée et la tactique sont différentes. Le jeu vise l’attaque et la défense de la nuque, tandis que le combat réel vise le dessus du dos. Les adultes parviennent d’ailleurs à rester assis ou debout pendant les joutes. La hiérarchie de dominance peut donc être prédite en observant les jeux entre les immatures. Celui qui attaque le plus souvent au cours de cette période devient un subordonné à l’âge adulte. Les adultes subordonnés ont des rapports de jeu plus fréquents avec les dominants qu’entre eux. Cela conduit parfois le dominant à tolérer leur présence. Certains subordonnés évitent en revanche le dominant. Ils sont alors fréquemment attaqués lorsqu’ils le croisent et plus enclins à le remplacer s’il disparaît.
Source : http://www.ratbehavior.org/
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